Non expédiée en son temps, trouvée dans cette armoire, garde-manger, nid et WC privés des souris, effectua néanmoins son petit voyage, non oblitérée, par taxi, train, taxi, glissé entre les pages d’un livre, puis posée sur une table, ou bord de fenêtre, bien en vue, nous l’enverrons un jour à Lucien et Mireille, ce sera drôle – tu parles. Déplacée de l’un de ces quelques parts qui abondent dans un appartement à un autre la carte resterait vierge de sens, ne connaîtrait jamais le timbre humidifié par une langue ou éponge, appliqué d’un coup de poing, ne connaîtrait ni le choc d’un tampon, pas plus que l’ombre d’une boîte aux lettres ou celle d‘une saccoche de facteur, mais seulement, un temps, l’espace confiné entre les pages d’un autre livre, avant que d’en tomber et finir dans un tiroir ou placard, territoire potentiel des souris si celles-ci n’étaient tenues en respect par la rustique mais efficace tapette ou le tout aussi performant et plus moderne piège électronique. Si le rongeur vert qui hier courrait dans l’herbe et que l’on savait transformer en escargot est aujourd‘hui gris et citadin, la guerre, elle, n’est pas terminée.