Que ne ferions-nous pas pour
faire – quoi? Peu importe, pourvu que nous le fassions. En y mettant
et du coeur et des muscles, en espérant que celui-ci tiendra et
que ceux-là ne lâcheront pas. Le reste suivra. Ce reste pourrait
être un but à atteindre au bout duquel ce faire
se réaliserait. Dans ce cas, il se suivrait pas mais serait poursuivi.
„Allons-y tout de même,“ se dit Firmin, avec l’intention
de se mettre à la recherche de „l’être merveilleux.“
A partir de quel critère un être, dans toute sa banalité
d’étant, quitterait-il cet état pour parvenir à
ce stade du „merveilleux?“ Firmin n’en avait aucune
idée. Certes, il avait maintes fois entendu autour de lui : „Ah
ce Lucien, quel être merveilleux!“, „Oh, Camille, c’est
vraiment un être merveilleux!“ C’est l’amour qui
parle, soit, mais ophtalmique notoire, parle de ce qu’il ne voit
pas. Il existait aussi bien sûr des endroits, qui, lorsqu’ils
ne sont pas „pittoresques“, sont „merveilleux“.
On affale sa viande dans un transat, sirotte un coktail ; se couche le
soleil, les cocotiers balancent : c’est merveilleux... „Merveilleux
mon cul!...“ pensait Firmin, „ou merveilleux par nécessité
en tout cas. Ce pour quoi on aura payé doit nécessairement
l’être – ô, divertissement...“
Il marchait d’un bon pas, se dirigeait vers le fleuve, étape
nécessaire à son projet. Car s’il n’avait pas
réfléchi avant de se mettre en marche pour il ne savait
trop où, il avait eu suffisamment de temps de le faire en marchant.
Un boulevard encore à traverser et il y était, à
ce fleuve. Il se faufila entre joggers, cyclistes, piétons, pour
atteindre un môle, brise-vagues en blocs de basalte ou basanite
qui a la couleur et la dureté du fer contre lesquels venaient
clapoter les vaguelettes formées par le passage des péniches.
Il resta un temps à considérer ces pierres,
plus vacuolaires que compactes, auquelles la vase avait donné une
teinte terreuse claire, sombre par endroit, moins pour en apprécier
la beauté minérale que de s’assurer de la justesse
de son intuition.
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